Les maillons.

Je n’ai voulu, comme un fardeau
Poser ma vie sur tes épaules 
Que tu la portes en sac à dos
Que tu demeures à son école.
Mais te voilà à présent seul
Debout par dessus mon linceul
À te poser tant de questions 
Qui était-il ? Qui était ce père ?
Il gardait sur lui un bâillon
Et il me laisse sans repères.

Comment faire le juste choix ?
Juste témoigner de la voie 
Qu’on a suivie bon gré, malgré 
Ou malgré soi ou volontiers.
Ne point vouloir donner leçon 
Montrer l’erreur et le succès 
Sans excuse et sans confession 
Puisque de tout on n’a la clef.
Dire ce qu’on aime et quoi blesse
Sans trop cacher de ses faiblesses.

Transmettre au suivant ce qu’on sait
Qu’on a compris, qu’on a aimé,
C’est le devoir qu’ont les aînés 
C’est ce qu’ils peuvent au moins laisser.
Et ceux qui n’ont cet héritage 
Demeurent avec leurs questions 
Sauront-ils faire témoignage 
Le léguer à leurs rejetons ?

La seule force d’une chaîne 
Est bien celle de ses maillons.