Rêve de papier

La page désespère de n’être pas noircie 
De n’avoir mots posés sur sa face blanchie. 
Cela fait bien longtemps qu’elle attend la visite
De tout de ce que contient une histoire écrite.

Car lorsqu’elle naquit, cela lui fut promis
Que d’avoir pour destin d’être ainsi envahie.
D’être un jour griffée d’une plume fébrile 
Et aussi raturée pour des mots malhabiles.

La page sait qu’elle n’est qu’une porte à ouvrir 
Et qu’en a seul la clef celui qui va écrire 
Elle offre un chemin vers tous les cœurs sensibles 
Il n’est rien qui pour elle puisse être impossible.

Elle n’est que patience en attente du don
Que lui fera ou pas cet auteur à venir 
Si elle reste vierge, elle n’aura de pardon
Pour celui qui n’a su nulle phrase offrir.
La page de papier est remplie d’amertume
Quand les mots à venir ne sont plus rien qu’écume
Que signes virtuels affichés sur écran 
Qui lui vole tous ceux qu’elle accueillait avant.

Alors la page blanche en devient une idée 
L’absence qui précède ce qui est exprimé.
Rien ne lui garantit qu’elle sera imprimée 
Ou même un brouillon qu’on aura oublié.