Sans traces.

Avez-vous remarqué la douceur de lumière
Dans un matin d’hiver tout chargé de printemps ?
Quand il n’y aura plus d’yeux, ni non plus de prières 
Pour célébrer encore la magie du moment, 

Quand les mots seront tous par force orphelins
De ne pouvoir passer, qu’il n’y aura nulle bouche,
Pas plus qu’aucune page puisqu’il sera trop vain
D’espérer une main, qui l’effleure et la touche.

Avez-vous ressenti la fraîcheur de cette eau
Qui coule du torrent libéré de ses glaces ?
Quand on ne verra plus sur son bord prendre place
Un homme assoiffé pour en goûter le flot.

Quand les choses seront à jamais ce qu’elles sont
Sans personne pour scier les barreaux des prisons.
La beauté sera devenue inutile 
Sans poète ou artiste pour en tisser les fils.

Avez-vous entendu le doux chant des oiseaux
Quand leurs trilles résonnent avec le renouveau ?
S’il reste des oreilles mais plus d’admirateurs
Pour dire à quel point il les touche au cœur,

Quand les sons ne seront hélas plus que des bruits
Qu’ils ne seront musiques et pas plus mélodies.
Si l’homme sans la terre se trouve dans l’impasse
La terre sans les hommes, n’a d’histoire ni de traces.