Un voile léger.

Je ne l’ai point donnée, quand donc l’ai-je perdue
Me l’aurai-t-on volée ? Je ne m’en souviens plus
Quand elle s’est envolée, ne m’en suis aperçu 
Mais tout ce que je sais c’est que je ne l’ai plus.

Je parle d’innocence mais qu’entend-on par là 
Est-ce de l’ignorance ou est-ce plus que ça ?
Une forme de confiance sans arrière-pensée 
En sorte une existence qui n’a été blessée.

Dès lors que la souffrance surgit sans prévenir
Dès lors que sans raison il nous faudra souffrir
Qu’on cherche la justice dans ce qui nous advient
Qu’on voit les sacrifices par lesquels on nous tient

Alors elle s’efface, sans doute qu’elle passe
Comme un voile léger qui part de guerre lasse
Mais depuis la lumière est d’autant aveuglante
Comme une douleur devenue lancinante,

Comme si le savoir, comme si la conscience
Effaçaient le fragile manteau de l’innocence
Comme s’il était là pour armer de patience
Les esprits points trop mûrs, pour oser l’existence.